« Vois-tu, si un poisson venait me trouver, moi, et me disait qu’il va partir en voyage, je lui demanderais : « Avec quel brochet ? »
N’est-ce pas : « projet », et non : « brochet » que vous voulez dire ? »
CARROLL : « Les aventures d’Alice au Pays des Merveilles » ch.10, p.152.

Mai 68 au pays des Wonder



(A propos de : « La reprise du travail aux usines Wonder » (1968) de Jacques Willemont et de « Reprise » (1997) de Hervé Le Roux)


Mai 68 fut et demeure, au sens fort, un événement politique.
Un événement, c’est-à-dire un choc capable de transformer le cours d’une vie, de manière irréversible, par l’irruption d’un mouvement qui bouleverse l’ordre existant et se projette à l’échelle historique.
Un événement politique, qui a ébranlé l’ensemble des forces sociales, politiques, institutionnelles. L’Etat fort et policier mis en place par la constitution de 58, à l’issue d’un coup d’Etat militaire a vacillé un moment ; ce fut l’hiver du patriarche, cet avatar bonapartiste qu’était De Gaulle. Dans son génie sénile, il savait encore trouver les mots ; de Mai 68, il a dit, deleuzien malgré lui: « C’est insaisissable… », ce qui, du reste, n’était pas faux.
La grève massive, prolongée, avec occupation des rues, des entreprises, des services, des universités, des théâtres… a remis en cause le gouvernement, le pouvoir, la propriété, l’Etat, ne serait-ce que par la confrontation avec ses bandes armées. Mai 68 a bel et bien posé la question du pouvoir… et ne l’a pas résolue.
Cet événement a redéfini la question du sujet, individuel et collectif.
Dans les années soixante, Colette Magny chantait un poème d’André Suarès qu’elle avait mis en musique et dont voici le refrain :
« Lorsque l’humanité sera enfin sage
Nous passerons de la compétition
Dans l’individualisme
A l’individualité dans la coopération… »
C’est ça, Mai 68 : « l’individualité dans la coopération » : une pratique libertaire (et non libérale - quelle scélératesse !) de tous ceux et de toutes celles qui devenaient, en accéléré, des sujets politiques. La lutte fit aussi réapparaître, après une assez longue éclipse, la classe ouvrière comme le sujet politique et historique du changement de société. Cette réciprocité de l’individuel et du collectif dans l’action posait, en faits et en idées, le problème (non résolu lui non plus) de la révolution.

***

1) Le court-métrage de Jacques Willemont : « La reprise du travail aux usines Wonder », restitue, directement et indirectement, et par les seuls pouvoirs du cinéma, un moment (la partie valant pour le tout) de cet événement politique.
Il s’agit d’un film documentaire de 10 minutes, tourné en 16mm et en blanc et noir, devant l’usine Wonder de Saint Ouen, le 10 juin 1968, vers 13h30
[1].
L’essentiel du film se compose d’un plan-séquence
[2] enregistrant une discussion dont la « vedette » est une jeune femme brune qui crie : « Non, je rentrerai pas… non, moi je rentrerai pas là-dedans… je mettrai plus les pieds dans cette taule […] on est dégueulasses jusqu’à là (elle montre le haut de ses bras), on est toutes noires… ! »









Le matin même, dans un cinéma voisin où se tenaient les assemblées générales après la fin de l’occupation de l’usine, la reprise du travail avait été votée par 560 voix contre 260 ; vote vraisemblablement « machiné » par la direction, comme le dit la jeune femme[3].
Ce court-métrage est un concentré, un précipité, au sens chimique du mot, dont le ressort dramatique est la reprise ou la non reprise du travail, selon deux lignes de forces visuellement marquées par les banderoles du début (« Nous ne cédons pas, nous ne rentrons pas ») opposées à la petite porte de la fin devant laquelle le chef du personnel (ancien tirailleur des guerres coloniales) incite ceux de Wonder à rentrer. Le film résume ainsi une topographie de la lutte : dans le prolongement d’une manifestation dans Saint Ouen, les Wonder avaient occupé l’usine pendant trois semaines et élu un (vrai) comité de grève
[4]. En ce 10 juin, ils sont dehors et doivent retourner dans l’usine, pour y travailler[5].
La jeune femme n’est pas la seule à refuser de rentrer : un homme (en voix off) et une autre femme (visible) refusent eux aussi. D’ailleurs, d’après un témoignage dans « Reprise »
[6], le travail, à Wonder, n’a repris que deux jours plus tard.
Plus généralement, cette date du 10 juin est symptomatique des tensions maintenues dans le reflux des grèves: c’est le jour des affrontements à Renault-Flins et à Peugeot-Sochaux, dont l’enjeu est la reprise des usines aux CRS
[7].
Ces résistances et ces refus témoignent, parfois violemment, d’une conscience excédentaire des grévistes les plus déterminés, conscience que ni Grenelle, ni la perspective des élections législatives ne suffisaient à absorber
[8].


2) Qui sont les protagonistes de ce film, là, devant l’usine Wonder, le 10 juin 68 à 13h 30 ?
Hervé Le Roux, pour les besoins de son film « Reprise » a retrouvé trois d’entre eux :
-
l’homme à la cravate, c’est un responsable du PCF, élu municipal à la mairie de St Ouen : Pierre Guyot, fils de Raymond Guyot, membre du bureau politique du PCF. Il n’est pas de Wonder. Il vient pour proposer la reprise « dans l’unité ».







- l’autre interlocuteur de la jeune femme est un cadre CGT de l’union locale de St Ouen, Maurice Bruneau. Lui non plus n’est pas de Wonder, lui aussi vient prôner la reprise.










- Le jeune homme, c’est Poulou, lycéen de 16 ans, militant maoïste de l’UJCLM ; il récuse le terme de « victoire » utilisé par Pierre Guyot et donne raison à la jeune femme.











Car, bien sûr, il y a la jeune femme… si « Nouvelle Vague… », dit Hervé Le Roux, avec ce mot qu’elle répète et qui semble emprunté à un film : « dégueulasse »…
[9] Il a fait son film pour l’identifier, la retrouver … et il a échoué, n’obtenant tardivement que quelques informations biographiques et un prénom.
Ici, elle joue Mai 68, égérie involontaire de la globalité d’une révolte, porteuse d’un cri qui aura des échos nombreux et massifs dans les luttes des O.S. des années 70. Elle est davantage l’avenir des luttes que leur passé même si elle vient aussi de ce cycle de luttes ouvrières des années soixante, luttes qui se sont intensifiées en 67 et au début de 68 et qui se sont révélées après coup être les signes avant-coureurs de quelque chose qui n’était pas encore écrit.
Elle dénonce la dureté des conditions de travail - la saleté noire de l’atelier du « charbon » (manganèse et noir de fumée entrant dans la composition des piles…), le manque d’hygiène, la rareté des pauses, l’arrogance des petits chefs… Les anciennes de Wonder dans « Reprise » ajouteront à cette liste : le travail à la chaîne des filles embauchées à quatorze ans dès la sortie de l’école, l’augmentation des cadences, la saisie de la paye par les parents…

3) Cette jeune femme porte la parole ouvrière
[10] que Grenelle n’a pas prise en compte.Elle ne se retrouve pas dans les points acquis à Grenelle que rappelle le délégué C.G.T: augmentation des salaires (10% en moyenne, 33% de plus pour le S.M.I.G), paiement de 50% des journées de grève mais dispositions de rattrapage des heures perdues (la « semaine en moins » dont elle parle), reconnaissance de la section syndicale d’entreprise (argument-massue en faveur de la reprise), mais rien sur les conditions de travail !
Le cégétiste aurait pu ajouter : la mensualisation, le retour progressif aux 40h, l’allongement des congés payés… mais signaler aussi deux échecs cuisants : le non-retrait des ordonnances de 67 sur la Sécurité sociale
[11] (prévoyant en particulier la remise en cause de la représentation syndicale et le déremboursement de certains médicaments), et le passage à la trappe de l’échelle mobile des salaires (ce que l’une des voix du film rappelle plusieurs fois).
Le « constat » de Grenelle (puisque rien n’a été signé) est en grande partie un vestige du passé et non la prise en compte de ce qu’il y avait de nouvelles « potentialités radicales émancipatoires »
[12] dans la grève. C’est l’analyse qu’en fait René Mouriaux : « Le problème de la pénibilité du travail se pose. On se souvient tous du film sur la reprise à Wonder : « je ne veux pas rentrer, c’est trop dégueulasse ! ». Il n’y a pas eu de prise en compte de cette question dans les négociations de grenelle. Il y avait 15 thèmes, mais, en dépit de l’importance de la grève, peu de créativité revendicative de mai 68. Grenelle, c’est la production de l’accord CGT-CFDT du 10 janvier 1966, qui a été actualisé en mai 68. Mais sans thèmes nouveaux. L’autogestion n’a pas été mise en avant, sauf si on y inclut la réalité de la section d’entreprise…la pénibilité est présente mais elle n’est pas traitée… la question allait être portée par la vague suivante, celle des révoltes de OS en réaction à l’intensification des cadences. » [13]


4) Ne nous y trompons pas : ce qui se joue devant Wonder, ce 10 juin 68, a aussi une valeur stratégique.
D’abord en ce qui concerne la reprise elle-même, ses modalités. Georges Séguy, alors secrétaire général de la CGT, dans son livre « Le mai de la CGT » établit un parallèle révélateur : « Il n’est pas question, pour nous, de donner un ordre de reprise du travail puisque nous n’avons jamais donné celui de grève générale. »
[14]. Pas de mot d’ordre central, certes, mais des pressions à la base…La présence et les interventions de Pierre Guyot et de Maurice Bruneau montrent que, même en l’absence d’un mot d’ordre central, l’orientation des responsables de la CGT et du PCF était de pousser à la reprise y compris, comme à Wonder, malgré un vote trafiqué par la direction de l’usine.
Deuxième élément : on se souvient de la fameuse phrase de Maurice Thorez, en 36, face au mouvement de grève avec occupation, sous le gouvernement du Front Populaire : « Il faut savoir terminer une grève… » ; on la retrouve ici ; Pierre Guyot fait deux tentatives pour développer un argument et commence chaque fois sa phrase par : « Il faut savoir… » et il est chaque fois couvert par Poulou qui reprend et enchaîne : « Il faut savoir terminer une grève… » ; Guyot continue en disant d’abord : « …dans quelles conditions… » puis : « juger les choses d’une manière… » et Poulou, lui, ajoute à : « il faut savoir terminer une grève… » : « …mais ce n’est pas le cas… »
[15] . Rapidité allusives du débat de fond : on ne saura jamais si les débuts de Pierre Guyot reprenant le célèbre « Il faut savoir » étaient un signal volontaire… atténué par la suite ; ce qui est sûr, c’est que le lycéen s’engouffre dans la brèche ouverte et formule clairement l’implicite de la situation et sa valeur de répétition historique.
Troisième prolongement : Pierre Guyot résume ainsi son argumentation : « C’est par étapes… On peut pas tout avoir d’un seul coup… » et, plus tard : « C’est par étapes que tu arrives à une victoire définitive. » Malheureusement, l’histoire du mouvement ouvrier est la négation têtue de cette vision linéaire et étapiste de la transformation sociale et politique: la remise ne cause des acquis est incessante et les victoires partielles ne débouchent pas spontanément sur une « victoire définitive » si l’on ne profite pas de ces moments où ceux d’un haut ne peuvent plus gouverner comme avant où ceux d’en bas ne veulent plus l’être comme avant pour pousser l’avantage d’une façon résolue et tendre vers un processus et une rupture révolutionnaires..
Il n’y a pas dans le film de discussion directement politique mais un échange très allusif entre Pierre Guyot et Poulou est une référence subtile à l’enjeu politique global et à des désaccords de fond qui ne sont pas formulés; désignant la jeune femme, Poulou dit à Guyot : « J’en dis pas plus qu’elle… », Guyot : « Tu en dis plus quelle… », Poulou : « Non ! », Guyot :
«Mais si ! »
Autant et peut-être plus que les résultats de Grenelle, c’est la perspective des élections législatives décidées par De Gaulle, le 30 mai (en gros : je reste, je maintiens Pompidou, je dissous l’assemblée et j’appelle à des élections) qui plombe la situation. Pour la Gauche en 68, la grève de masse, subie plus que voulue, fut limitée à une pression pour l’ouverture rapide de négociations victorieuses (« étape » vers la « victoire définitive… », pour reprendre Pierre Guyot), avec pour seul débouché politique une perspective électorale déconnectée du combat social et qui fait lâcher la proie pour l’ombre : l’arrêt de la grève pour une hypothétique victoire aux législatives… mais des élections sans la grève, les élections contre la grève…


5) Les personnages du film sont à leur façon des porte-paroles politiques, là, en direct, devant la caméra ; plus encore : ils sont modifiés par sa présence et deviennent spontanément des personnages, ce qui renvoie à ce que Stuart Hall appelle le « sens aigu de la politique comme « théâtre » »que mai 68 a manifesté, selon lui
[16].
D’ailleurs, dans « Reprise », Poulou a cette formule : « Nous étions tous en mission… » et il ajoute : « Si c’était à refaire, je ne le dirais pas comme ça… c’était étudié, j’avais peur qu’il [Pierre Guyot] me retourne une claque… ».
Pierre Guyot, de son côté évoque la difficulté de parler à des non-syndiqués :
« C’est pas facile d’expliquer ça aux femmes non-syndiquées… quand c’est une grève sauvage… en gros… et qu’on leur dit il faut aller travailler… pour elle ce n’était pas suffisant… »
Maurice Bruneau, enfin, dit avoir eu envie de casser la caméra car il craignait qu’on n’utilise ce qui était filmé « contre la CGT et contre les travailleurs ».
Une véritable mise en scène s’organise dans l’urgence, sous nos yeux, avec les panoramiques de la caméra dont l’amplitude est bornée par le militant C.G.T. d’un côté, le lycéen de l’autre, la femme au centre qui bouge, sort du champ et y rentre, sous la pression de Maurice Bruneau qui veut la calmer et la faire taire.
Une mise en scène , c’est-à-dire la complémentarité des mouvements des personnages et de ceux de la caméra dans l’ espace sociopolitique d’une confrontation typique de Mai 68 qui risque d’être aspiré par la porte étroite par où passe la fin de la grève. Et le spectateur est pris à partie, mis en scène lui aussi, constitué en sujet politique par ce débat.
En reprenant les termes de Jean-Louis Comolli on pourrait considérer ce bref film à la fois comme la trace d’une « inscription vraie » (l’exactitude « documentaire » de ce qui est filmé, photographié) et une « auto-mise en scène » des gens filmés. C’est un « miroir à deux faces »
[17] : document unique à force d’être double, réversible en lui-même, travaillé de forces extérieures qu’il réfracte en les transformant.
Le court-métrage de Jacques Willemont est une exploration spontanée et hagarde de ce moment de juin 68 devant l’usine Wonder à St Ouen et il est aussi, simultanément, une mise en scène qui localise et surjoue
[18] l’événement politique global que fut Mai 68, sans le maîtriser ; en ce sens, il est inépuisable.

***

Cette vue cinématographique permet de tirer des fils, du passé au présent, de l’histoire à l’actualité
[19], de prolonger la version politique, et non pas policière de Mai 68 : gauchistes aventuristes et provocateurs faisant le jeu de la réaction, selon la direction du PCF, complot de l’étranger en particulier de Moscou ne respectant plus le partage du monde scellé à Yalta, selon De Gaulle.
Seule une approche sociale et politique, qui ne réduise pas Mai 68 à une simple grosse grève revendicative pendant laquelle partis de gauche et syndicats ont fait tout ce qu’il était possible de faire, permet de comprendre pourquoi la jeune femme de Wonder nous parle encore, quarante ans après, à un moment où les luttes avec blocages, occupations et envois de CRS se multiplient, où la jeunesse reste la « plaque sensible de la révolution », où la France connait une étrange crise de représentation politique, où la constitution anti-démocratique de 58 qui est toujours à l’œuvre, vient d’être infléchie dans un sens encore plus bonapartiste par la venue possible du président de la République devant le Parlement réuni à Versailles, et où la réaction nostalgique et passéiste va chercher dans le théâtre d’ombres du gaullisme la farce de l’intéressement et de la participation des travailleurs à l’entreprise… ce qui nous avait fait beaucoup rire, un certain soir de 68, quand le patriarche à court d’arguments l’avait proposé, avant le référendum sur la loi de « modernisation » de la France - O vieilles lunes !- dont l’échec, en 1969, le mettra au repos.

Bernard Chamayou. 10 juin 2008.

[1] Au début du film, un carton nous informe : « Ce documentaire aurait dû constituer une séquence du film de long-métrage intitulé « Sauve qui peut Trotsky » que Jacques Willemont tournait en mai et juin 68 avec une équipe technique composée d’étudiants de l’IDHEC (Institut des hautes études cinématographiques). Son sujet : le mouvement militant de l’O.C.I. (Organisation communiste internationaliste). Les rushs ont étrangement disparu dans la nuit du 14 juillet 1968 : « Wonder » est la seule séquence qui a été sauvée. Récemment, une partie des éléments négatifs du long-métrage a été retrouvée aux archives du film à Bruxelles. »
[2] C’est-à-dire tourné et monté en continuité, sans coupures ni raccords.
[3] Une voix du film dit : « La direction a fait pression sur les Nord-africains, les Algériens… »
[4] Le fait est signalé par Ernest Mandel dans son article « leçons de Mai 68 », in « De la Commune à Mai 68 », éditions La Brèche, Paris 1978. Celui-ci ajoute : « … pour manifester leur réprobation de l’orientation réformiste de la C.G.T., ils se sont barricadés dans l’usine et en ont interdit l’accès aux responsables syndicaux ». (pp.256-257).
[5] Un rapprochement a été fait entre ce film et la « La sortie de l'usine Lumière» : places significatives dans l’histoire du cinéma (les origines du cinéma pour l’un, la mutation cinématographique des années soixante pour l’autre), motifs symétriques de la sortie et de l’entrée, genre commun de la vue cinématographique, avec, pour le film de Willemont, des recadrages par panoramiques et une bande-son.
[6] « Reprise », le long métrage qu’Hervé Le Roux a réalisé en 1997 à partir du film de Jacques Willemont.
[7] Il y a eu trois morts ce jour-là et pendant la nuit qui a suivi : le lycéen Gilles Tautin qui s’est noyé à Renault-Flins en fuyant les charges des CRS et, à Peugeot-Sochaux : Pierre Beylot a été tué par la balle d’un CRS et Blanchet est tombé d’un mur à la suite de l’explosion d’une grenade (Cf « Critique communiste » n°186, mai 2008, « Mai 68 »: « Mai-juin 1968 à Peugeot-Sochaux. Comité de grève, comité de base, Forum », p.87).
[8] Dans l’article déjà cité (cf note 4), Ernest Mandel inclut Wonder dans une longue liste de formes d’action radicales et d’auto-organisation : «lorsqu’on complètera cette liste, comment pourra-t-on contester qu’elle exprime la tendance spontanée de la classe ouvrière à prendre en main son propre sort et à réorganiser la société d’après ses convictions et son idéal ? Sont-ce là des manifestations d’une grève purement revendicative, d’une grève « quelconque », ou d’une grève dont l’ampleur et la logique poussaient les masses elles-mêmes à déborder les revendications immédiates ? » (pp.257-258-259).
[9] Voir la fin de « A bout de souffle », de Jean-Luc Godard, le personnage joué par Jean Seberg demande : « C’est quoi « dégueulasse ?» ».
[10] Hervé Le Roux a réalisé un deuxième documentaire intitulé « Paroles ouvrières », toujours à partir d’entretiens avec des ancien(ne)s de Wonder.
[11] Une grande journée d’action était prévue pour le mois de mai sur cette question ; il semblerait que Georges Pompidou, loirs des discussions de Grenelle ait mis sa démission dans la balance sur ce point ( ?!).
[12] « [Marx]… cherche à expliquer comment ces potentialités radicales-émancipatoires trahies « insistent » encore, tels des spectres historiques hantant la mémoire révolutionnaire, réclamant leur mise en œuvre, de sorte que la dernière révolution prolétarienne devra également racheter (enterrer) ces fantômes du passé… » Slavoj Zizek, « La Parallaxe », « Ouvertures », fayard, Paris 2008, p.108.
[13] René Mouriaux, entretien : « L’énigme de Mai 68 », « Critique communiste » n°186, Mai 68, pp.117-118.
[14] Georges Séguy, « Le mai de la CGT », Témoignages, Juillard , Paris 1972, p.112
[15] Par rapport à cette phrase de Thorez, on objecte parfois la malhonnêteté intellectuelle que constituerait sa restitution incomplète ; la version intégrale est : « il faut savoir terminer une grève lorsque l’on a obtenu satisfaction » ; mais cela ne change rien au fond du problème : elle devient alors un truisme inutile sauf si, justement, on appelle à reprendre le travail alors que satisfaction n’a pas été obtenue… et ils étaient nombreux, en juin 68 et plus tard, à le penser.
Dans « Reprise », Pierre Guyot déclare :
« Je considère qu’il faut arrêter une grève à un moment donné… quand on a acquis… ce qu’on a acquis en 68… il fallait arrêter sinon… on perdait tout. ».
[16] Renvoyant aux « vicissitudes du sujet », au « passage aux temps nouveaux », aux révolutions culturelles et théoriques des années 60… cf Stuart Hall, « Le Populisme autoritaire », « Le meilleur des mondes », Editions Amsterdam, Paris 2008, p.86.
[17] Jean-Louis Comolli « Le miroir à deux faces », dans : Jacques Rancière, Jean-Louis Comolli, « Arrêts sur histoire », collection « Supplémentaires », Centre Georges Pompidou, Paris 1997.
[18] On peut dire de la jeune femme qu’elle surjoue…
[19] « Le cinéma s’évertue à nous faire croire qu’il reflète ce qui est alors qu’il fait bien mieux (ou bien pire) : il fabrique ce qui sera », Jean-Louis Comolli, article cité p.12.

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