La Splendeur des Tenenbaum. 3.
II
ACCUMULATION
L’accumulation
est le principe de construction du film mais elle en
organise aussi certaines figurations.
La SERIE est un mode de composition linéaire
(l’échelonnement des plans et des séquences) et un mode de figuration interne (la multiplicité
immédiate des éléments présentés dans un même plan).
La fonction du livre est, de ce point
de vue, exemplaire : d’une part, la série
de ses chapitres, qui assure la construction générale du film, d’autre
part, la présentation en série par
enchâssements multiples – en quinconce -
des exemplaires du livre filmés dans le même plan fixe, en plongée
directe.
Cette disposition démultipliée du même
exemplaire est reprise pour chacun des livres présentés et ils sont nombreux car
les personnages sont presque tous des auteurs. Les revues et les disques, enchevêtrés
eux aussi, les rayonnages surchargés, les
collections d’objets (tableaux,
trophées…), prennent le relais, comme autant de signes de la réification de la
vie familiale.
Le film se présente comme un
« cast of characters» généralisé, une distribution et une redistribution des rôles et des personnages,
une variation de bandes-annonces. C’est le mode de construction systématique
des premiers chapitres : démultiplication des agencements et des modélisations
de paradigmes familiaux à plusieurs entrées… Il s’agit de séries dans la série,
de dérivations de séries : l’une
des plus drôles est celle du rapport du détective privé sur les frasques de
Margot : dix plans successifs par ordre chronologique, de 12 ans à 32 ans. Et dans ce cas aussi, comme pour le livre
initial, les écrits s’actualisent en images cinématographiques.
Ces dispositifs rompent les liens
habituels (« réalistes ») qui régissent la représentation dominante,
« organique », du groupe familial. « Sériation », « sérialité »,
cinéma « sériel » fait de reprises, de répétitions, de juxtapositions
variées liées par un minimum de raccords : le téléphone, quelques effets
de boucle ou d’encadrement, assurés parfois par la place du père dans l’échelonnement.
C’est un cinéma de ruptures et de
réenchaînements. Qu’est-ce que cela révèle et qu’est-ce que cela cache ? Entassements dans l’espace et le temps pour
différer les conflits, pour laisser les secrets dans l’ombre ? Schize filmique
comme figure familiale centrale ou préparatifs d’une autre mise en scène ?
suite
début
de vains éclaircissements
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