La splendeur des
Tenenbaum
C’est d’abord l’invention qui caractérise
ce film (et le cinéma de Wes Anderson en
général) : une invention continue, exubérante, proliférante, souvent réjouissante,
d’une cérébralité labyrinthique.
Elle est au service de la modélisation cinématographique d’une
famille : non pas une famille-modèle – si tant est qu’il en existe – mais un
modèle de famille, c’est-à-dire d’une
structure exemplaire organisant des relations multiples, une modulation, un échantillonnage.
Le point commun entre le montage et
le groupe familial c’est qu’ils sont des agencements de pièces rapportées. La principale pièce rapportée de la famille
Tenenbaum, c’est Margot, la fille adoptive, qui devient peu à peu le personnage
central du film : «C’est ma
fille adoptive», « tu n’es pas mon
père », la distance est affirmée et maintenue.
Autre
pièce rapportée, Eli, le voisin d’en face, qui déclare, vers la fin du
film : « J’ai toujours voulu
être un Tenenbaum », ce à quoi Royan Tenenbaum, fidèle à son
narcissisme dévastateur, répond : « Moi
aussi… Moi aussi ! ». Eli ajoute, énigmatique, avant de s’enfuir :
« Mais maintenant ça n’a pas le même
sens… ».
Quels principes esthétiques règlent cette
modélisation, cet agencement ?
[1]
Le titre de ce texte fait référence au film d’Orson Welles La Splendeur des Amberson (The Magnificent Ambersons, 1942), qui
traite lui aussi des splendeurs et des misères d’une famille bourgeoise
américaine. Les deux films, à soixante années de distance, abordent chacun à
leur façon, le grand sujet du cinéma américain, qui irrigue tous les
genres : la constitution – ou la reconstitution - d’une famille.
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